Newsletter 466 du 07 juin 2020
Bernard Fournier
vient de nous quitter (voir newsletter 454). Parmi les documents qu’il nous a transmis, j’ai trouvé un résumé des principaux faits marquant notre profession dans la seconde moitié du XXe siècle, qui fut pour notre métier, comme pour toutes les avancées technologiques et médicales de ces années-là, des moments enthousiasmants, où rien n’était acquis, où tout restait à tester, à mettre au point et à découvrir. Bernard, témoin et acteur de tous ces changements, a aussi fait partie des combats syndicaux pour défendre notre profession, à l’époque où les réseaux sociaux n’existaient pas, et où de très nombreux talentueux prothésistes dentaires n’hésitaient pas à s’engager durablement pour soutenir les revendications des laboratoires. Merci de nous avoir laissé ce témoignage chronologique que je vous livre ici.
Claude Message
Trésorier APD cmessage@apd-asso.fr
Chronologie de la prothèse dentaire en France..
La prothèse dentaire ,Chronologie :
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Vers 1800
le dentiste fait les prothèses lui-même. L’époque étant au « gens de maisons » ; les taches mineures sont confiés à ceux-ci. Progressivement ils vont devenir des «mécaniciens dentistes» qui réaliseront complètement les prothèses sur les empreintes prisent par le chirurgien-dentiste.
- Ils seront pendant de nombreuses années cantonnées dans un réduit contigu au cabinet puis dans la cuisine transformée en « laboratoire ».
- Certains seront installés dans la chambre dite « de bonne » qui existait dans tous les immeubles bourgeois, au dernier étage.
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1854 Premiers dentiers en vulcanite. La prothèse prend son essor. .
- Fabrication des premières dents artificielles en porcelaine.
Vont apparaître sur le marché les dents diatorics pour les postérieures, les dents à tube pour molaires et incisives, les dents à crampons ceux-ci sont en métal doré pour la « mobile », celles avec des crampons platine sont pour la « fixe », et les dents steels à glissière également.
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1880 La fabrication des bridges : En clinique prise du périmètre cervical après la préparation des dents piliers. Au « laboratoire » on réalise un tube de ce diamètre avec une feuille en or à 22 carats, épaisseur 2/10e, le dentiste l’ajuste en bouche et prend une empreinte de positionnement au plâtre.
Sur les tubes le mécanicien-dentiste soude un plateau, c’est la face occlusale. Pour les intermédiaires des plaques façonnées supporteront les dents en porcelaine industrielles. Le tout est bouterollé pour retrouver une certaine anatomie. L‘ensemble est en or à 22 carats.
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1895 Quelques laboratoires indépendants : les « façonniers ». Ils réalisent les plaques estampées.
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1900 La formation est exclusivement faite par l’apprentissage en toute servitude
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1920 La lime et la gouge. sont remplacés peu à peu par :
Les tours électriques d’établis, à flexibles ou à cordes (5000 tours) équipés de pièce à main, les meules, les pointes montées, les fraises
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1921
La coulée selon la technique de la cire perdue apparaît à cette période, mais avec une certaine imprécision. On ne maîtrise pas encore les coefficients de rétraction des alliages, ni l’expansion des revêtements. Ils sont confectionnés par le laboratoire.
Pour couler : - plâtre : 1 partie - talc : 1 partie - kaolin : 1 partie
L’équipement est des plus rudimentaires : fronde à main, four à cylindre au Gaz, (on coule au rouge sombre).
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1922 Les premières jackets porcelaine sont cuites sur une feuille de platine au 2/100e.
Les fours ont un pyromètre et un rhéostat, L’opérateur régule la vitesse de la montée en t° et sa stabilisation. Malheur à celui qui n’est pas attentif.
La céramique est dite aérienne. Point de fusion : 1060° ou 1300° selon les fabricants.
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1949
L’équipement s’améliore :
Vibrateur pour couler les empreintes, taille-plâtre, fours à cylindres électriques, tours suspendus à flexible (10 000 tours).
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1950
Les hydrocolloïdes réversibles et irréversibles remplacent le plâtre pour les prises d’empreintes. Le mécanicien-dentiste n’est plus nécessairement un expert en reconstitution de puzzle.
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1951
Les appareils en résine vont se substituer à ceux en caoutchouc. Les dents en résine sont commercialisées. Des poudres de différentes teintes permettent de les réaliser au laboratoire (sculpture en cire, mise en mouffle, bourrage, cuisson).
Cette même année débute la fabrication des « stellites » appareils squelettés en alliage chrome cobalt. Ils vont remplacer très rapidement les « plaques » estampées (appareil en métal) d’une technique complexe, fastidieuse.
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1952
La galvanoplastie reproduit l’empreinte unitaire. Celle-ci est prise avec une bague de cuivre ajustée à la préparation et comblée par une pâte dite de composition (La pâte de Kerr).
Le revêtement est plus précis pour les coulées. Toute la prothèse conjointe est faite en métal précieux. Quelques couronnes à bague en acier subsistent.
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1953 Les matériaux d’empreintes aux élastomères permettent de réaliser au laboratoire inlays, onlays, couronnes, bridges selon la technique dite indirecte.
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1960
La mise en revêtement des maquettes est faite sous vide. La coulée des alliages est simplifiée avec la fronde mécanique qui est alors sans protection.
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1963 Aux États-Unis la firme Céramco crée une nouvelle technique : la céramique sur métal précieux ou céramo-métallique. Les premières réalisations sont crayeuses, des fêlures sont fréquentes. Très rapidement les dents industrielles (crampons platine, dents à tube, à glissière) ne seront plus les éléments cosmétiques en prothèse « fixe ».
- Simultanément la céramique traditionnelle sera remplacée par la céramique sous vide. Elle est translucide, plus solide, plus naturelle, moins de rétraction à la cuisson ; mais son implantation n’est pas évidente : il faut investir dans un four à céramique spécial, avec une pompe à vide. Des controverses amusantes interviennent entre les Chirurgiens-dentistes : pour ou contre le sous vide !
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1965 En deux ans le sous-vide s’impose ainsi que la céramo-métallique sur or.
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1968 Les premières prothésistes sont admises dans la profession.
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1966 Création par le Docteur Leibowitz du Club Français de Céramique Dentaire entouré des prothésistes : Lagneaux, Pichard. Michaelli, Pradoux, Ollier, Lambart, Ganzo, Landez, Hugon, Gastine…
- Les prothésistes ne seront plus intravertis. Ils communiquent entre eux leur technique, leurs échecs, leur succès.
- C’est le début d’interventions publiques. Les premiers seront Francisco Ganzo, Claude Landez.
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1969 – 1971 Jacques Lambart fait des essais fastidieux de céramo-métallique sur nickel/chrome et chrome/cobalt. Il lui faut résoudre les problèmes d’adhérence céramique métal, les fêlures. En collaboration avec un praticien hollandais le docteur Drodje il effectue des recherches sur la céramique pressée.
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1970 Le docteur Juillet pose les premiers implants, Landez les réalise selon la technique de la « grille »
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1972 Trois possibilités de liaisons céramique- nickel/chrome :
1°) La dorure de l’armature par galvanoplastie (Paul Pretto, Claude Landez).
2°) Projetat au chalumeau spécial. Projection d’une poudre métallique sur les armatures créant des milliers de rétentions et multipliant la surface de contact entre la céramique et l’alliage. (Saragossi, Desgranges, chirurgiens-dentistes).
3°) Des rétentions mécaniques par guillochages ou par électro soustraction.
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31 mai 1974
Un arrêté ministériel détermine notre appellation : prothésiste dentaire. Le « mécanicien-dentiste » va encore perdurer de nombreuses années.
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1975 - 2005 Michel Cavaillez participe aux travaux de l’ AFNOR
(L’Association Française de Normalisation) pour les produits dentaires.
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1977 Le docteur Duret chirurgien dentiste à Grenoble tente de mettre au point une machine à « faire des dents » au cabinet dentaire selon des données informatiques.
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1981 Les premiers collages, en clinique, d’attelles collées, réalisées par le prothésiste. Une simple mise de dépouille des dents piliers pour les bridges est suffisante.
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1982
Inlays, facettes en Porcelaine sont réalisés au laboratoire à partir d’empreintes aux élastomères, en utilisant un revêtement spécial céramique.
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1983
Premières prothèses en Titane, métal qui semble très séduisant pour ses propriétés de biocompatibilité.
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1984
Dernières participations des chirurgiens-dentistes au jury du CAP de prothésiste dentaire.
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1990 L’ordinateur est utilisé dans le laboratoire pour la gestion.
La turbine, les micromoteurs facilitent l’usinage au quotidien.
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1993 Directive européenne 93/42. Les dispositifs médicaux sur mesure ne devront pas présenter de risques pour ceux qui les portent ni pour ceux qui les manipulent. Le laboratoire est donc responsable de la conception et de la fabrication des prothèses qu’ils réalisent.
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1994 Le B.T.M. (Brevet technique des métiers) de niveau 4 ainsi que le B.T.M.S. (Brevet technique des métiers supérieur) niveau 3 sont mis en place par l’U.N.P.P.D. (Union Nationale des Patrons Prothésistes Dentaires) en collaboration avec l’A.P.C.M. (Assemblée Permanente des Chambres de Métiers).
Il y a deux domaines : Professionnel et gestion de l’entreprise.
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1994
Parallèlement est créé par l’éducation nationale le B.P. (Brevet Professionnel) de niveau 4. Il est uniquement professionnel.
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2000
L’ère du numérique :
La C.A.O (Conception Assisté par Ordinateur) ou C.A.D. (computeur-aided design).
La C.F.A.O (Conception Fabrication Assistés par Ordinateur) ou C.A.M (Computeur-Aided Manufacturing) qui assure l’interface entre le système de C.A.O. et les machines
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2001
Un nouveau matériau est utilisé pour recevoir le cosmétique en céramique La Zircone (oxyde de Zirconium).
Bernard Fournier
Prothésiste Dentaire, Maître artisan (1936-2020)